Elle avait 33 ans quand elle a loué cette maison, située sur la route de Frères à Pétion-Ville, en Haïti. Mais à sa grande surprise, elle a réalisé, en quelques mois seulement, que cet appartement, d’une étrange harmonie numérique, possédait également 33 fenêtres, exactement autant que son âge à l’époque.
Cette coïncidence a éveillé sa curiosité. Était-ce un signe avant-coureur ? Au fil des années, elle a observé l’augmentation progressive du nombre de fenêtres, tout comme son vieillissement. Cela semblait se produire en même temps que sa propre avancée en âge. De même, le coût de son loyer augmentait progressivement, de manière sournoise. Mais son salaire n’a jamais progressé face aux défis de l’inflation immobilière.
Lutter pour un toit en Haïti : le combat quotidien d’une femme face à la flambée des loyers
Avec un revenu mensuel de 45 000 gourdes, équivalant à 322 dollars américains, elle peinait à joindre les deux bouts. Chaque jour, elle serrait les dents et endurait les privations pour économiser l’intégralité de dix longs mois de travail acharné, uniquement dans le but de s’acquitter du loyer annuel. C’était une épreuve quotidienne, une lutte incessante pour sécuriser un toit au-dessus de sa tête et demeurer en conformité avec la Constitution haïtienne de 1987. La Loi mère, dans son article 22, stipule que « L’État reconnaît le droit de tout citoyen à un logement décent… » Ainsi, cette femme, même au-delà de ses moyens, s’est débrouillée pour se procurer un logis digne de ce nom.
Les contours de la dignité : les critères clés d’un logement décent
Un logement décent n’est pas ce taudis accessible en traversant des couloirs jonchés d’immondices où bourdonnent les mouches. Un logement décent ne se réduit pas à un édifice dépourvu d’installations électriques et sanitaires fonctionnelles, de l’accès à l’eau potable, d’une ventilation adéquate et d’une protection adéquate. Un logement décent ne saurait être une minuscule boîte aux murs vacillants que le souffle le plus ténu du vent pourrait ébranler. Un logement décent, ce n’est pas cette masure qui ne répond pas aux besoins des résidents en termes d’espace vital et de circulation.
Entre revenus modestes et coûts exorbitants : l’inégalité du logement en Haïti
En Haïti, les maigres salaires peinent à suivre l’envolée des prix des loyers. Cela met en exergue l’inégalité grandissante entre les revenus et les coûts du logement en Haïti, ce qui rend ardu pour de nombreux individus de subvenir à leurs besoins élémentaires, malgré leurs modestes revenus.
C’est une réalité épineuse où les individus se trouvent confrontés à des dépenses de logement disproportionnées par rapport à leurs maigres ressources.
Une pression financière écrasante pèse sur les épaules des Haïtiens. L’ascension fulgurante du coût de la vie, en particulier celui du logement, rend difficile l’accumulation d’économies suffisantes, même avec des revenus réguliers.
Réinventer la lutte : vers une prise de conscience pour une politique de logement équitable en Haïti
Il est essentiel, selon moi, que notre peuple réinvente sa lutte. Quand verrons-nous des groupes de pression émerger, mettant en lumière l’importance d’une réflexion approfondie sur les politiques économiques et sociales en Haïti, dans le but de réduire l’écart entre les revenus et les coûts du logement ?
Des initiatives telles que la promotion de l’emploi, l’investissement dans des logements abordables et l’établissement de réglementations visant à encadrer les loyers pourraient contribuer à apaiser ce déséquilibre et à offrir aux individus une plus grande sécurité économique et résidentielle.
Je m’abstiens de révéler l’âge de cette femme en ces jours-ci. Cependant, il est clair que le logement décent qu’elle a loué compte désormais un nombre encore plus élevé de fenêtres. Lorsque je l’ai rencontrée, vendredi soir, elle m’a confié que ces fenêtres se multiplient à un rythme effréné, jusqu’à en devenir vertigineux, poussant à la tentation du suicide. Qui se chargera donc de l’empêcher de succomber à ces pensées ?