Comment les parents, en Haïti, peuvent-ils tirer le meilleur parti des soixante jours de vacances d’été pour offrir une expérience enrichissante à leurs enfants ? Les camps d’été peuvent être une solution, bien qu’il y ait toujours place à amélioration.
La pratique des camps d’été, qui remonte aux dernières décennies du XXe siècle, s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par les Haïtiens pour s’adapter à la modernité, souligne l’historien Pierre Buteau. Selon lui, c’est également une occasion de renouveler les liens familiaux, offrant ainsi aux enfants l’opportunité de se sociabiliser avec des camarades provenant d’autres écoles.
Les camps d’été en Haïti : un regard sur l’accès et les attentes des parents
Considérant la nocivité croissante des programmes télévisés et la progressive disparition des repères familiaux, les camps d’été sont perçus par Kesler Bien-Aimé comme une alternative pédagogique efficace en dehors du cadre scolaire pendant les vacances. Cependant, selon ce sociologue, tout repose sur les bienfaits que ces activités peuvent apporter à l’enfant. Un point de vue partagé par l’historien Michel Soukar, qui évoque certains camps de renommée internationale dont la mission est d’immerger les jeunes dans leur langue maternelle, afin qu’ils en saisissent les moindres subtilités.
Les camps de vacances s’inscrivent parmi une pléthore d’activités, incluant le sport, la culture et les loisirs, dans le but avoué de favoriser l’épanouissement psychosocial de l’enfant, affirme le psychologue Sylvestre Ulrick Francillon en signe d’approbation. Toutefois, le docteur Francillon estime qu’une infrastructure logistique et un cadre structurel doivent être mis en place pour y parvenir. Il déplore que les différentes activités généralement annoncées, telles que la natation ou les visites de musées, semblent souvent destinées à tromper les parents afin de leur soutirer de l’argent. Ces préoccupations sont partagées par le sociologue Bien-Aimé, qui, se basant sur son expérience de père, estime que dans la majorité des cas, les attentes des parents sont presque toujours trompées.
En Haïti, les camps estivaux sont généralement un fourre-tout où les enfants sont gardés quelque part, loin de leurs parents qui sont soit occupés, soit incapables de tolérer l’agitation des enfants à la maison, mais c’est rarement un endroit où les jeunes esprits s’épanouissent réellement.
Les camps d’été sont trop chers pour de nombreux parents
Qui sont donc ceux qui choisissent d’envoyer leurs enfants en camp d’été ? À cette question, Michel Soukar répond sans détour que seuls des individus de la classe moyenne et de la bourgeoisie, ayant les moyens financiers, peuvent se permettre de payer le coût élevé des camps d’été. Cependant, trouver un bon camp d’été en Haïti semble dépendre du flair des parents. La chance joue également un rôle important. Trois responsables de camps, dont nous tairons ici les noms, ont confié que l’organisation d’une telle activité implique des investissements lourds qui ne sont pas toujours à leur portée, d’autant plus qu’ils ne bénéficient d’aucune subvention.
À la question de savoir si un camp d’été a besoin d’être reconnu ou accrédité par un organisme étatique, ou si des normes à respecter ont été établies, ils répondent par la négative, ajoutant qu’ils se retrouvent parfois avec un nombre trop élevé d’enfants pour un seul moniteur en raison du manque de ressources financières. Néanmoins, même avec les moyens du bord, ils affirment accomplir leur travail.
Valoriser les compétences des enfants : une proposition pour des camps d’été adaptés en Haïti.
Juniace Sénécharles Etienne, docteur en sciences de l’éducation et auteur de l’ouvrage intitulé « Les Trois étapes pour guider l’avenir de vos enfants en matière d’éducation », est d’avis qu’il serait bénéfique d’avoir, en Haïti, des camps d’été axés sur les compétences des enfants.
En collaboration avec les directeurs d’école et les enseignants, les organisateurs pourraient, selon elle, mettre en place des activités supervisées par des responsables du ministère de l’Éducation nationale, afin de valoriser le potentiel de chaque enfant en fonction de sa vocation future, que ce soit dans le domaine médical, de l’architecture, ou autre. Ainsi, les jeunes campeurs pourraient vivre une expérience de vacances enrichissante en participant à des jeux interactifs animés par des spécialistes dans des domaines de compétences spécifiques.