Elle a triomphé de l’épreuve du chômage, le jour où elle a pris conscience d’être une marchandise. Les parents ne travaillaient pas, mais redoutaient l’ascension de leur fille. À mesure que nous gravissons les sommets, l’appétit de l’abime s’accroit, prêt à dévorer notre chute, ainsi le rappelait toujours sa sage grand-mère.
Elle possédait l’art subtil de monnayer sa propre chair auprès de ceux qui savaient lui adresser des éloges sous forme de dons monétaires. Chaque client devenait ainsi son complice, ignorant le jeu de la prostitution dissimulé derrière leur prétendue amitié. En l’absence de toute politique publique de l’emploi, elle échafaudait sa propre politique privée de survie face au chômage.
Elle était sa propre entreprise. Elle élaborait le budget, assurait la gestion, évaluait les risques (notamment ceux liés à la rencontre de personnes malades, malintentionnées ou malveillantes) et offrait un service client impeccable en tant que seule responsable de son activité.
Tout chômeur se sent souvent seul et coupable de sa situation. Et parfois, même en travaillant, on peut encore se sentir comme au chômage. En Haïti, ce phénomène est nommé le « chômage déguisé ».
Pour ceux qui se demanderaient pourquoi la demoiselle n’a pas appris un métier, je précise qu’elle était une diplômée en gestion qui a lutté pendant plus de trois ans sur le marché du travail avant de trouver un emploi qui l’a enfoncée davantage dans le chômage.
Ainsi se dessine l’histoire de cette jeune femme. Pourriez-vous, par votre éclairage, m’aider à saisir la raison pour laquelle elle a franchi le seuil, passant d’un emploi dérisoirement rémunéré à une activité socialement condamnable, mais bien plus lucrative ?